John et le téléphone portable

Nous rencontrons John au détour d'une promenade de nuit. Il loue une maison au centre du village d'Éourres depuis environ un an, et nous le trouvons devant sa porte, méditatif. La situation s'y prête et nous nous arrêtons pour discuter avec lui. Mais en posant la banale question du pourquoi de sa présence à Éourres, nous ne nous attendions pas à entendre une telle histoire. Il parle couramment français et anglais – il est irlandais d'origine –, mais c'est dans un allemand mélangé qu'il nous raconte sa vie des dernières années.

John menait une vie tout à fait normale, en Irlande, et habitait le dernier étage d'un immeuble. Malheureusement, une antenne-relais de téléphonie mobile se trouvait très près de son logement, et c'est elle qui, selon ses dires, a tout déclenché. Surexposé aux ondes mobiles, John est devenu électrohypersensible. Du jour au lendemain, son corps n'a plus pu supporter les ondes.

Son récit était plein de détails sur le déroulement de son passage à l'état d'électrohypersensibilité et à la vie qu'il a menée avec. Par souci d'exactitude, nous résumerons beaucoup celui-ci. John a donc été alité pendant une année entière, sans pouvoir rien faire – le malaise est tel qu'il est difficile d'entreprendre quoi que ce soit. Mais il n'a pas désespéré et a employé son temps à ce qui lui a paru le plus utile : écrire.

Il a ainsi assemblé une grande quantité de textes, récits au jour le jour de sa situation. C'est finalement l'association Robin des Toits qui lui conseillera le village d'Éourres, où il a pu retrouver une vie normale. Peut-être pas la vie dont il rêvait, peut-être que l'expérience et le village lui apporteront beaucoup. John est un optimiste, mais pas question d'en rester là. Il souhaite utiliser ses textes pour en faire un livre, pas une simple retranscription de son histoire, mais « un beau livre romancé, qui donne envie de lire » tout en informant un maximum de personnes. L'éditeur Yves Michel, également habitant d'Éourres, pourrait bien l'aider dans cette aventure.

On entend finalement assez peu parler des risques liés à l'utilisation ou même à l'exposition aux ondes de téléphonie mobile (ou autres). Des rapports, des actualités – comme la récente décision de justice de faire retirer une antenne-relais¹ – nous rappellent à l'ordre et nous font nous poser la question. Mais rencontrer quelqu'un qui est directement touché par le phénomène est une toute autre expérience, qui vous force plus brutalement à repenser votre manière de vivre, votre quotidien, vos habitudes.

 

¹ (màj) depuis la rédaction de notre article, des rebondissements sont à noter dans les décisions de justice en question : « Les maires ne peuvent pas bloquer l'installation d'antennes relais » et « Éric Besson salue la décision du Conseil d'État sur les antennes relais ».